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Représenter la Grande Guerre

Dernière mise à jour : 14 mai 2020

André Claudot est mobilisé en 1914 et démobilisé durant l'été 1919. Son itinéraire dans la guerre le conduit sur le front occidental (Fauconcourt, Lorette...) et dans les Balkans. Il en ramène plusieurs centaines de dessins le plus souvent à l'encre et quelques huiles sur bois peintes après la fin des combats. Il va aussi envoyer des dessins antimilitaristes à des journaux anarchistes dont l'un sera publié. En réfléchissant à la question de l'artiste en guerre, les étudiants ont proposé des portraits d'artistes dans la guerre et des analyses d'oeuvres d'André Claudot liées au conflit. André Claudot (Gustaw Szelka, Antoine Asselin), Otto Dix (Théo Benegni, Éva Lambert, Anna Emilie Wehrle), Alfred Bastien (Paul RIVIERE, Mouraz DAOUDI, Eleuthère LAMARE, Clovis LERECULEUR), Christopher Nevinson (Hélysa CRICHAN, Lucie GRANDJEAN, Leo HERVADA SEUX) et enfin, John et Paul Nash (Elise FOUQUIER, Clovis SOLO, Augustin LECLERCQ, Paul MARGUIER). Du fait du confinement, la plupart des vidéos de groupe prévues initialement ont été remplacées par des textes. Photographies : André Claudot, Tirailleur assis, "1918", Encre et crayons, Collection privée, DR, © R. Mazuy (photographie) André Claudot, "En Artois 26.5.1915", Dessin au crayon et pastel, Collection privée, DR, © R. Mazuy (photographie)

André Claudot, "Col d’Egre-Polonka - 11-10-18", Encre, Collection privée, DR , © R. Mazuy (photographie)

André Claudot, "Plateau de Lorette - 1915", Encre, Collection privée, DR, © R. Mazuy (photographie) André Claudot, Verdrel. 15-6-1915, Encre, Collection privée, DR, © R. Mazuy (photographie) André Claudot, Détail de son dossier militaire, © Archives départementales de la Côte-d'Or


Andre Claudot and different faces of the Great War

Gustaw Szelka


World War I, being the catastrophic event that it was, it comes as no surprise that it has inspired countless artists, dedicated to show the horror of this military conflict to the world. Aside from the well-known names such as Erich Maria Remarque in the literature, or Otto Dix in painting, some artists that are lesser known to the general public have also contributed to this task, Burgundian André Claudot among them.


Being an anti-militarist himself, Claudot in his works depicts some of the more cruel aspects of the war, but also the everyday life under it. He had the chance of experiencing the nightmare of the endless bloodshed himself, having frequented the combat areas in eastern France, and later on in Serbia. His works, both paintings and drawings, are characterised by a huge diversity of themes, ranging from picturing the immediate effects of fighting to its influence on the wider populace.

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André Claudot, Le Calvaire de Fauconcourt, Collection PJ Lacaille, DR, © Edouard Barra.

His paintings and sketches showing the reality on the frontline, are perhaps the most similar to the most well-known depictions of the Great War. Some of the aquarelles, notably “Deux soldats et un cadavre” and “Cadavre de cheval” (Private collections) aim at showing the ruthlessness of the fighting, and what it leaves behind. The blur given by being painted with aquarelles adds to the felling of despair the frontlines bring, as well as takes away a bit of realness of the picture, making it seems like a madman’s dream. The sketch “Tranchée” summarizes Claudot’s feelings towards the realities of the “modern”, total war, having depicted the trenches as an entrance to an ominous graveyard, a grim tomb for so many young men.


The collection of paintings and sketches devoted to the Balkans, the landscapes and villages, made in the later period of the war, show us a completely different reality. Instead of focusing on the toll that war had taken on the backlines, in the Balkans perhaps even bigger than in France, Claudot shows a rather toned-down vision of life in the countryside. The sketches focus on the architecture, while the oil paintings of nature, landscapes, and charming city corners give us a bit more surrealistic, fairy-tale-like picture of the Balkan dwellings. By presenting it in such a way Claudot tries to show that despite the madness of the war raging nearby, which he depicts in his other works, life for others goes on in its regular rhythm, a testament of life’s persistence in spite of powerful politicians’ games.

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The set of works devoted to showing the everyday life behind the front lines combines in a way the two aforementioned ones. This collection of sketches focuses on soldier’s everyday routine and habits outside of the trenches. They write letters home, rest, spend time with their peers, in a word doing everything trying to forget about what awaits them just a few miles away. Claudot also acknowledges participation of colonial soldiers, something than often gets omitted in more mainstream art at that time. With a sketch of a Senegalese soldier he reminds us that what was initially a quarrel between European elites, ended up implicating people from distant lands, completely unrelated to politics of the Old Continent.

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All in all, André Claudot presents us with a very interesting and wide range of pictures on the subject of World War I. He does, like many other contemporary artists, present the heavy toll the conflict takes on its participants, but what makes him stand out is showing the normality that runs people’s lives as usual. His works on daily habits of people, civilians and soldiers alike, try to show that in spite of the war ravaging the land, certain routine in our everyday life will have the upper hand anyway, a reassuring point for many in a world that seems keep on descending into insanity with each passing day.

Otto Dix et la Guerre de 1914-1918 Théo Benegni, Éva Lambert, Anna Emilie Wehrle

Pour respecter le droit d'auteur nous n'avons pas mis de mis les oeuvres évoquées, même si des reproductions sont libres de droits. Cliquez sur le titre de l'oeuvre ou le texte en bleu pour les découvrir.

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Otto Dix, né le 2 décembre 1891 à Untermhaus en Thuringe et mort le 25 juillet 1969 à Singen, fût un des artistes les plus célèbres et importants allemands du XXe siècle. Il étudie à l’École des arts appliqués de Dresde jusqu’en 1914, où il s'initie au cubisme, au futurisme et au dadaïsme. Après le déclenchement de la guerre, il s'engage volontairement et participe aux combats sur les fronts de l’Est et de l’Ouest jusqu’en 1919. Suite à la fin de la guerre, il se réinstalle à Dresde puis à Düsseldorf et Berlin, où il continue d'enseigner à l’école des Beaux-arts. Avec l'arrivée du régime national-socialiste, renvoyé de l'école, diffamé et persécuté, il quitte Dresde pour s’installer sur le lac de Constance où il va passer le reste de sa vie.

Un art de soldat pendant la guerre

L’art militariste d’un artiste engagé sur le front : - Selbstbildnis als Soldat/Autoportrait comme soldat, 1914, 68 x 53,5 cm, ©Galerie municipale, Stuttgart, ©Galerie municipale, Stuttgart.

- Selbstbildnis mit Artilleriehelm/Autoportrait avec un casque d’artillerie, 1914, ©Galerie municipale, Stuttgart.

- Selbstbildnis als Mars/autoportrait comme Mars, 1915 (labeled for reuse)

Quand la guerre se déclenche en 1914, Otto Dix s’engage volontairement avec son ami Kurt Lohse. Lors d’un entretien en 1965, Otto Dix explique : « La guerre était une chose atroce, mais pourtant puissante. Je ne pouvais absolument pas manquer cela. Il faut avoir vu l’être humain dans cet état de déchaînement, pour savoir quelque chose sur l’homme. » Dix est donc fasciné par la guerre et veut en faire partie. Sûrement influencé par sa passion pour le futurisme, la guerre est le symbole d'une situation exceptionnelle qui pourrait stimuler son œuvre. Il y participe en premières lignes et les œuvres qui naissent pendant les premiers mois du conflit illustrent bien cette fascination pour la guerre, comme par exemple son Autoportrait de 1914 avec un casque de l’artillerie ou son Autoportrait de lui comme soldat également de 1914. Aussi bien la fascination pour la guerre que l’influence du futurisme sur l'oeuvre de Dix sont aussi illustrés dans son Autoportrait comme Mars, alors comme Dieu de la guerre, de 1915. La couleur rouge, qui deviendra typique pour ses représentations de la guerre, l’influence du cubisme et les éléments de la tenue des soldats forment une image puissante de la guerre, qui est encore loin des représentations sombres faites par Dix plus tard.

La désillusion face à la violence de la guerre

Effectivement, Otto Dix comme beaucoup, sera pris d’un fort élan militariste au début de la guerre. Cependant, là aussi comme beaucoup de soldats, sa désillusion face à la guerre devient de plus en plus grande surtout face à la question de la violence généralisée du premier conflit mondial. Cela se répercute dans son art alors que les conditions de la guerre impose à l’artiste l’usage du crayon de papier. Ces non-couleurs monotones donnent ainsi un aspect encore plus morose et terne aux représentations de la guerre faites par Dix. Au delà des contraintes techniques, l’artiste a cependant tendance à représenter toute forme de paysage comme violent. Une simple forêt devient oppressante dans ses dessins par les traits droits qui s’enchevêtrent : forêt morte dans un no man’s land, ravagée par les obus. Tous les paysages qu’il représente sont déformés de traits qui s'entrecroisent, telles des déchirures qui se recoupent. Ses autoportraits deviennent aussi de moins en moins flatteurs, son visage est torturé par la violence et les cicatrices se font de plus en plus profondes.

Nahkampf/Combat au corps à corps, 1917, ©Estate of Otto Dix, Collection privée


Un art post-guerre


Un art engagé : entre violence de la guerre et indifférence de la société aux soldats meurtris


Après la Première guerre mondiale, Otto Dix participe d’abord aux mouvements de l’expressionnisme et du Dadaisme. Puis, il devient, à partir de 1924, avec George Grosz (un autre artiste allemand), l’un des tenants de la Nouvelle Objectivité. Cette dernière s’inscrit dans la continuité de l’expressionnisme, et se caractérise par cette même volonté de rompre avec les codes du passé en prenant le parti de la radicalité. C’est un courant contestataire, fondé sur la volonté de mettre en évidence les travers de la société allemande, dépeinte avec cruauté et pessimisme.


D'après un entretien de 1961, Otto Dix déclare : «C'est que la guerre est quelque chose de bestial : la faim, les poux, la boue, tous ces bruits déments. C'est que c'est tout autre chose. Tenez, avant mes premiers tableaux, j'ai eu l'impression que tout un aspect de la réalité n'avait pas encore été peint : l'aspect hideux. La guerre, c'était une chose horrible, et pourtant sublime. Il me fallait y être à tout prix. Il faut avoir vu l'homme dans cet état déchaîné pour le connaître un peu.» Après la prise du pouvoir par les nazis en 1933, Otto Dix est donc l'un des premiers professeurs d'art à être renvoyé. En 1937, ses œuvres sont dites « dégénérées » par les nazis. 170 d'entre elles sont retirées des musées et une partie est brûlée, d'autres sont exposées à l’occasion de la célèbre exposition nazie « d’art dégénéré ».

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Joseph Goebbels visitant l'exposition d'art dégénéré à Berlin (tableaux d'Emile Nolde et sculptures de Gerhard Marcks), 27 février 1938 ©Bundesarchiv, Bild 183-H02648 / CC BY-SA 3.0 DE


Les oeuvres d’après guerre peintes par Otto Dix sont souvent très détaillées. Il peint avec du recul, sa peinture est très réfléchie.



Entre 1929 et 1932, Otto Dix compose son triptyque La Guerre (Der Krieg) qui deviendra l’une des oeuvres les plus célèbres de l’artiste. Chaque panneau raconte une scène différente : A gauche dans la brume, on voit les soldats partir au front. Au centre on perçoit la terrible bataille et ses morts. A droite, on peut voir le soir ou la nuit avec des flammes en arrière-plan. Otto Dix cherche à peindre l’apocalypse, le désespoir, notamment à travers l’utilisation de couleurs ternes. Le rouge est par ailleurs mis en valeur, couleur du sang, de l’enfer et du feu. Otto Dix dresse ici un portrait cru et réaliste de la guerre.



Parallèlement à cette peinture sombre, Otto Dix peint de 1927 à 1928 Metropolis, considérée comme une représentation par excellence de la culture populaire décadente de la République de Weimar. Ce triptyque décrit les années folles d’après guerre. Les couleurs sont chaudes et vives. On peut apercevoir des femmes habillée en Charleston, dansant sur du jazz et vivant dans le luxe. Ces personnages contrastent avec les mendiants dans les rues. Ces derniers sont des gueules cassées, des survivants de la 1GM. Otto Dix dénonce ici l’indifférence des populations aisées face à ces hommes détruits pas la violence de la guerre.


Le retour des soldats dans la société



Il convient effectivement de s’intéresser au retour de ces soldats dans la société, auxquels Dix a consacré de nombreuses peintures. En 1920, Otto Dix peint l’oeuvre Pragerstrasse, présentant un homme (un ancien soldat) qui avance sur une planche à roulette, sans jambes. Des personnes passent devant lui sans même le regarder. Dix dénonce ici le mépris et l’indifférence de la société au retour de ces hommes mutilés. Un ancien soldat au corps désarticulé est perceptible au second plan, ses yeux sont vides, il fait la manche. A l’arrière plan, une petite fille seule (qui symbolise les nombreux orphelins de la guerre) et une vitrine de magasin. Un mannequin en pièces détachées et avec des prothèses s’y trouve ce qui renvoie directement aux atrocités de la guerre. Ainsi, Otto Dix s’attache à peindre, dans le détail, la réalité d’après-guerre et à secouer l’indifférence de la société de cette époque face aux victimes de la guerre.


Pour conclure, le parcours de Dix est finalement assez classique pour un soldat pendant la guerre et après la guerre. D’abord soldat enthousiaste, patriote et militariste, son opinion change vite face aux réalités d’un conflit qui s’enlise. Alors, son style suit, passant d’images plutôt flatteuses, plutôt classiques, vers des traits qui prennent la forme de cicatrices. C’est tout cela qui forme le style d’Otto Dix : les blessures guerrières. Toute son oeuvre d’après guerre est empreinte d’un fort pacifisme. Il ne propose pas une image idéalisée de la paix, mais bien des peintures qui sont des morceaux de peines et de douleurs, représentant d’un traumatisme partagé par de nombreux autres soldats.

DR. WALTHER, Lutz. Otto Dix 1891-1968 [en ligne]. Lebendiges Museum Online. Deutsches Historisches Museum Berlin. 14 septembre 2014 [consulté le 13 février 2020]. Disponible sur : https://www.dhm.de/lemo/biografie/otto-dix Otto Dix [en ligne]. Artnet. [consulté le 14 février 2020]. Disponible sur : http://www.artnet.de/k%c3%bcnstler/otto-dix/biografie SCHUBERT, Dietrich. Ein unbekanntes Kriegsbild von Otto Dix - zur Frage der Abfolge seiner Kriegsarbeiten 1915-1918 [en ligne]. 1996, Jahrbuch der Berliner Museen 39, p. 151-168 [consulté le 6 mai 2020]. Disponible sur : http://archiv.ub.uni-heidelberg.de/artdok/2990/1/Schubert_Ein_unbekanntes_Kriegsbild_von_Otto_Dix_1996.pdf Musée d’art de Stuttgart : https://www.kunstmuseum-stuttgart.de/

Alfred Bastien

Paul RIVIERE, Mouraz DAOUDI, Eleuthère LAMARE, Clovis LERECULEUR Pour respecter le droit d'auteur nous n'avons pas mis de mis les oeuvres évoquées, même si des reproductions sont libres de droits. Cliquez sur le titre de l'oeuvre en bleu pour les découvrir en même temps que vous écoutez l'enregistrement. Alfred Bastien (1873-1955) est un peintre belge, grand voyageur, qui participe à la représentation des colonies belges avant la guerre. Exilé en Angleterre en 1914, il s'engage comme volontaire en 1915... incorporé dans las section artistique de l'armée belge, il sera ensuite détaché dans l'armée canadienne. Ce peintre a priori très officiel, sera cependant membre du Parti communiste belge après la Seconde Guerre mondiale.

Alfred Bastien, La bataille de Pervyse, 1914

Huile sur toile, ©Imperial War Museum London


Alfred Bastien, La petite place d'Arras, 2 juin 1918, aquarelle sur papier, ©Musée canadien de la guerre, Beaverbrook Collection of War Art, CC- Wikimedia Commons -

Cette œuvre fait partie des études réalisées pour le panorama de l'Yser.


Alfred Bastien, Soldats Canadiens dans la boue à Passchendaele, 1917 - Elle a fait partie de War Canadian Memorial Exhibition 1920 - , Huile sur toile, Musée canadien de la guerre, CC - Wikimedia Commons


Alfred Bastien, A l'assaut, Neuville Vitasse, 1918, Huile sur toile, Musée canadien de la guerre, CC Wikimedia Commons

Alfred Bastien, Le Diorama, huile sur toile, 8mx72m, 1936-37, ©Musée royal de l'Armée et d'histoire militaire, Bruxelles

Les frères Nash, John et Paul

Elise FOUQUIER, Clovis SOLO, Augustin LECLERCQ, Paul MARGUIER


John et Paul Nash sont britanniques, frères, soldats et peintres. Ils retracent leur expérience dans le Nord de la France plongé dans les affres de la Première Guerre mondiale dans leurs travaux. Il mettent en scène les hommes, la nature mais surtout la destruction de toute vie et de tout repère.


Ecoutez l'enregistrement ici.

(Musique libre de droits, Stranger - Aerocity)

Cliquez sur le titre de l'oeuvre en bleu pour découvrir les oeuvres en même temps que vous écoutez l'enregistrement.

1er tableau : John Nash, Over the Top, 1918, Huile sur toile 79.8 cm × 108 cm (31.4 in × 43 in), Imperial War Museum, London, © IWM (Art.IWM ART 1656) :

2e tableau : Paul Nash, The Menin Road, 1919, huile sur toile, 1828 mm x 3175 mm, Imperial War Museum, London, © IWM (Art.IWM ART 2242) :

3e tableau : Paul Nash, Sunrise Inverness Copse, 1918, Imperial War Museum, London, © IWM (Art.IWM ART 774).

4e tableau : Paul Nash, Battle of Britain, 1941, Imperial War Museum, London, © IWM (Art.IWM ART LD 1550).

Christopher Nevinson et la Guerre de 1914-1918

Hélysa CRICHAN, Lucie GRANDJEAN, Leo HERVADA SEUX


Christopher Nevinson est sans doute l'un des peintres britanniques parmi les plus célèbres qui ont représenté la guerre. Engagé d'abord comme ambulancier en sur le front occidentale, il devient ensuite peintre aux armées, un peintre tout autant censuré que célébré... Oeuvres utilisées dans le film :

Christopher Nevinson, Self-Portrait, 1911, Huile sur papier, ©Tate Britain

Christopher Nevinson, La Patrie, 1916, Huile sur toile, ©Birmingham Museum and Art Gallery

Christopher Nevinson, The Doctor, 1916, Huile sur toile, ©Imperial War Museum

Christopher Nevinson, A Taube, 1916, Huile sur toile, ©Imperial War Museum

Christopher Nevinson, La Mitrailleuse, 1915, Huile sur toile, ©Tate Britain

Christopher Nevinson, The Road from Arras to Bapaume, 1917, Huile sur toile, ©Imperial War Museum

Christopher Nevinson, A group of soldiers, 1917, Huile sur toile, ©Imperial War Museum

Christopher Nevinson, Paths of Glory, 1917, Huile sur toile, ©Imperial War Museum

Le soldat dans la boue -

André Claudot, Secteur 117 Lorette 1915


Antoine Asselin


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André Claudot, Secteur 117 Lorette 1915, 1919-1964, Huile sur toile, DR, collection privée, © Edouard Barra


Œuvre à la trajectoire particulière qui concerne plusieurs parties de la vie d’André Claudot, Secteur 117 Lorette 1915 a été commencée en 1919 et n’est définitivement achevée qu’en 1964. Commencé au lendemain de la grande guerre, ce tableau sera définitivement achevé par André Claudot à la fin de sa vie pour commémorer le cinquantenaire du début de la der des ders. Intéressant de par sa trajectoire, l’œuvre est le témoin privilégié d’un début de siècle où le malheur et l’inhumanité rivalisent dans une même logique de destruction.


C’est donc pour dénoncer la première guerre mondiale que Claudot entame son œuvre.

De par son parcours politique, Claudot reste un fervent opposant à la guerre. Dans le documentaire de Bernard Baissat, il explique justement qu’il avait fait des efforts avec un ami de médecine pour être réformé du service militaire en 1913. Il aurait été faussement diagnostiqué d’un voile au poumon droit. Pourtant, il explique qu’il a vécu la guerre et que cela l’a bouleversé au point de « lui couper l’appétit ». Il n’a donc pas cessé de peindre dans l’après-guerre pour décrire les horreurs qu’il avait vu et ce malgré les interdictions de l’armée.

Ce tableau met en image un soldat de la première guerre mondiale. Il porte son paquetage, de gros gants et un sac. L’élément qui attire le plus mon attention est que Claudot a doté se soldat d’une écharpe rouge ce qui est inhabituel pour un soldat. Ce rouge peut se prêter à différentes hypothèses. Ce peut être tout d’abord la couleur du sang que Claudot a placé au centre du tableau. Au contraire l’écharpe rouge peut être le symbole du camarade communiste qui a été envoyé au front et qui doit subir la guerre.

Derrière le soldat se dresse un panorama de landes désertes, dévastés par la guerre dans lequel se distingue deux ou trois casques de soldats. La partie inférieure du tableau est marqué par le vert de la boue. Celle-ci agit comme un aimant et semble retenir le soldat.


Il faut étudier ce tableau dans la double conception qu’en a fait Claudot. En effet, il a commencé ce tableau en 1919 et ne l’a fini qu’en 1964. L’histoire de cette création révèle le fait que la mémoire de la première guerre mondiale n’a pas été linéaire. En effet, dans l’immédiat après-guerre, les différentes sphères se sont engagés pour dénoncer le massacre. Pour autant cette mobilisation a progressivement été oublié d’abord parce qui, au contraire de s’insurger contre la guerre en ont fait une habitude. Après la seconde guerre mondiale, la première guerre mondiale est tombée dans l’oubli. L’activité mémorielle se concentre surtout sur le conflit récent. L’écrivain François Mauriac dira « Ce que nous appelons la « grande guerre » disparait sous la marée boueuse de 1940 ». Dans les années 1945 à 1960, presque personne ne parle de la première guerre mondiale. En 1964, la France est encore plongée dans la mémoire résistancialiste. Pour le cinquantenaire du début de la guerre, Charles de Gaulle effectue deux déplacement Il va tout d’abord arpenté pendant une journée les fronts de la guerre. Ensuite il réalise une allocution télévisée où il dira notamment : « L'unité ! Telle est, Français ! la raison qui, depuis cette date nous rassembla souvent et nous rassemble en ce moment même autour des Monuments aux Morts de nos villes et de nos villages. »

C’est dans ce contexte particulier qu’André Claudot va reprendre l’œuvre qu’il n’avait jamais terminé pour la présenter pour le cinquantenaire. Il est intéressant de commenter que le parti communiste de l’époque jouait aussi de la mémoire de la seconde guerre mondiale. C’est pour cela qu’il ne s’inscrit pas dans le discours commun en reparlant de la première guerre mondiale. C’est donc un acte de nouveauté mémorielle.


Le soldat dans la boue est donc une œuvre de Claudot qui permet de retracer le parcours mémoriel e la première guerre mondiale entre période d’intense activité et oubli. Sa création n’est pas linéaire mais elle met en valeur, sur le temps longs les trajectoires de nos sociétés et celle de son peintre.

 
 
 

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